La photographie japonaise entre lumière et mémoire à la MEP
L’exposition Mémoire et lumière- Photographie japonaise, 1950-2000 investit la quasi-totalité des espaces de la MEP et propose une large sélection de chacun des 21 photographes de la donation, riche aujourd’hui de 540 pièces. Elle provient du fonds de la société d’impression japonaise Dai Nippon Printing Co., Ltd qui collabore avec la MEP depuis ses débuts. Elle est dédiée à la mémoire de Keiichi Tahara (1951-2017) et d'Hiroshi Yamazaki (1946-2017).
On y trouvera donc parmi les 540 œuvres exposées, les tirages de : Nobuyoshi Araki, Masahisa Fukase, Seiichi Furuya, Naoya Hatakeyama, Hiro, Eikoh Hosoe, Yasuhiro Ishimoto, Miyako Ishiuchi, Ihei Kimura, Taiji Matsue, Ryuji Miyamoto, Yasumasa Morimura, Daido Moriyama, Ikko Narahara, Toshio Shibata, Hiroshi Sugimoto, Keiichi Tahara, Hiromi Tsuchida, Shomei Tomatsu, Shoji Ueda, Hiroshi Yamazaki.
En 1992, sous l’impulsion de son président Yoshitoshi Kitajima, la Dai Nippon Printing Co., Ltd., décide de constituer pour la Maison Européenne de la Photographie une collection représentative de la photographie japonaise depuis le début des années 1950; à un moment où les photographes japonais sont quasi absents des collections publiques françaises. Ainsi, de 1994 à 2006, la collection s’est enrichie d’une ou deux séries majeures. Des choix pertinents, réalisés avec la collaboration de la galeriste Kazé Kuramochi, se sont avérés pertinents. Cette « collection dans la collection » révèle la place essentielle de la photographie japonaise dans l’histoire de la photographie mondiale et l’importance d’auteurs, devenus des acteurs majeurs de la création contemporaine.
En quelques décennies, dans un après-guerre bouleversé par la double tragédie nucléaire des 6 et 9 août 1945, suivie de l’occupation américaine qui durera jusqu’en 1951, se succèdent des générations de photographes témoins des bouleversements économiques et sociaux d’une société blessée mais en pleine mutation. En 1968, le Japon devient la troisième puissance économique mondiale. Dans le même temps, les mouvements contestataires des années 1960 libèrent toutes les expressions artistiques et particulièrement la photographie, notamment grâce à la revue Provoke publiée entre 1968 et 1969. Apprenant les uns des autres, ces auteurs repoussent toujours plus loin les possibilités et les limites de la photographie. Scrutant les failles et les cicatrices d’un pays meurtri mais en plein renouveau, ils confrontent l’intime à l’histoire collective, et s’impliquent totalement dans l’acte photographique avec une froide sobriété et une violence contenue qui confèrent à leurs travaux une puissance sous-jacente.
Beaucoup de ces photographes documentent le Japon dans un contexte historique qui influence fortement leur style photographique ; et bien que ces auteurs soient largement ouverts sur le monde, leurs travaux, jusqu’aux années 1980, sont peu diffusés à l’étranger. Les artistes nés après-guerre continuent de dépeindre l’identité japonaise, scrutant leur territoire tout en voyageant et en élargissant leurs champs d’investigation. Certains vivent et travaillent hors du Japon, comme Yasuhiro Ishimoto, Hiro, Keiichi Tahara, Seiichi Furuya. Aussi ne peut-on les cantonner à l’étiquette de photographie japonaise, tant leur propos est universel. La plupart ont une forte notoriété internationale. Ce qui les rassemble, c’est leur engagement dans l’acte photographique. L’exposition, qui occupe l’ensemble des quatre niveaux de la Maison Européenne de la Photographie, présente une très large sélection de chacun des vingt-et-un photographes de la donation.
Si certains photographes nous donnent à voir les conséquences d’une des plus grandes catastrophes humaines de tous les temps, alors que d’autres évoquent leur propre amour disparu, il se dégage de l’ensemble de ces travaux, toujours réalisés à la bonne distance, une force de la mémoire et une proposition de regarder en nous, avec humilité, notre propre humanité.
Cinquante ans de photo à la recherche de le lumière et de l'identité en mouvement du Japon secoué par l'après-guerre et l'occupation américaine ,jusqu'aux débuts des années 2000 et la quête d'une autre autonomie culturelle et politique. D'avant-garde en classicisme, le Japon flashé par ses plus grands artistes. On y va !
Jean-Pierre Simard le 28/06/17
Mémoire et Lumière, photographie japonaise 1950/2000 - Donation Dai Nippon Printing Co.,Ltd -> 27/08/17
MEP - 5/7, rue de Foucry 75004 Paris