Dia 2 Nao estou o baldio (Ceci n’est pas une friche) - Carnet de voyage des Martine’s à Lisbonne
Défricher la ville.
Prendre les rues parallèles, les obliques, toutes les obliques à contre-courant et à côté des grandes artères.
Longer le « Tejo » un peu, puis grimper au Bairro Alto.
Du bleu… Du vert… et des escaliers…
Les murs des casas antigas racontent des histoires.
Il faut les écouter.
Leurs façades de céramique, avec leurs interstices qui laissent pousser des herbes semées par le vent, sont comme autant de possibles qu’offre le quartier. Une ouverture sur le monde, sa diversité, son humanité, sa capacité à résister. Le temps passe, certaines céramiques d’azulejos s’effritent mais elles sont là et continuent d’enchanter le ciel sans rivaliser avec lui.
La mer de paille que l’on devine et que l’on rejoindra plus tard, scintille et souffle sur nous ses embruns, derrière la barrière de brume matinale pas encore dissipée.
En jardin, au milieu de la cité, loin du centre ville historique, se perdre.
Découvrir un paysage de banlieue, au nord de Lisbonne la belle !
Redescendre sur le Tage pour trouver le LX FACTORY promesse d’une friche sinon « arty » au moins curieuse.
Ce n’est qu’une promesse. Le capitalisme est passé par là. Et Lisbonne n’a pas résisté.
Plutôt que d’une friche artistique, underground, la friche n’a gardé que les oripeaux, des traces de graffeurs de talent, des espaces sublimes, investis par… des commerces !
Des commerces qui ont l’air de faire tous la même chose. Du design un peu hype mais pas trop.
Une librairie dénote, mais n’a pas une sélection renversante. L’espace qui semble être une imprimerie avec un reste de rotative impressionne. Les rangées de livres sont bien là. Quelques livres de seconde ou troisième mains sur le design ou l’histoire de l’art, mais les quelques livres neufs ne sont guère enthousiasmant. Dommage, tant l’adéquation n’est pas trouvée entre le lieu, encore une fois, un espace hors norme et l’activité.
L’endroit underground ?
Le seul, l’unique : Les toilettes !
Lieu au tags clownesques assumés, drôles, Ahahaha, Hihihihi !
Comme pied de nez à la sois-disant Factory que l’on croyait retrouver, peut-être !?
On dirait que Lisbonne à choisi son camp pour la friche juste près des docks.
Alors qu’une ville comme Nantes, Marseille, investissent ses friches pour en faire des lieux décalés de monstrations contemporains, avec une programmation plutôt pointue, ou au moins originale, Lisbonne à choisi de laisser le capitalisme de masse investir un lieu qui aurait pu faire la différence dans cette ville si incroyable.
Elle préfère caresser le « bobo-touriste » dans le sens du poil et lui proposer une rue (avec passage de voitures) où les « cantinhas » modeuses en pseudo vegan et autres cafétéria se battent les unes contres les autres. Un Bercy Village lisboete… avec de la bouffe très moyenne : Le plat du jour du Café de la Fabrica est franchement à oublier.
Sauf la bière, brassé pour la LX est bonne !
Heureusement, le chemin valait le détour… Le retour aussi !
Nous décidons de rejoindre la Praça do Comercio à pied, comme à l’aller, mais en longeant le Tage. Difficile mission, nous nous retrouvons sur le bord du chemin de fer, paysage improbable, un envers du décor, béton, ferraille et bâtiments d’une laideur criante dénote du haut de la ville de toutes les couleurs. C’est beau aussi l’envers du décor. C’est la réalité des choses et leurs beautés crues.
Il y réside une belle lumière…
Nous filons, avec nos 15 kilomètres à pieds au compteur, et tombons sur une vendeuse de Laranjada e Lemonade com gaze en tricycle. Ce sera un grand verre de chaque ! Les agrumes nous requinquent, nous désaltèrent et nous font du bien, simplement sous un soleil printanier qui se prend pour l’été.
Sur le chemin sont typographiés les mots du poète et nous marchons sur eux… « Quand nous sommes au pied du Tage, nous sommes seulement à ses pieds », comme se conclut le poème de Alberto Caeiro, l’autre nom du grand Fernando Pessoa !
O Tejo é mais belo que o rio que corre pela minha aldeia,
Mas o Tejo não é mais belo que o rio que corre pela minha aldeia
Porque o Tejo não é o rio que corre pela minha aldeia.
O Tejo tem grandes navios
E navega nele ainda,
Para aqueles que vêem em tudo o que lá não está,
A memória das naus.
O Tejo desce de Espanha
E o Tejo entra no mar em Portugal.
Toda a gente sabe isso.
Mas poucos sabem qual é o rio da minha aldeia
E para onde ele vai
E donde ele vem.
E por isso, porque pertence a menos gente,
É mais livre e maior o rio da minha aldeia.
Pelo Tejo vai-se para o mundo.
Para além do Tejo há a América
E a fortuna daqueles que a encontram.
Ninguém nunca pensou no que há para além
Do rio da minha aldeia.
O rio da minha aldeia não faz pensar em nada.
Quem está ao pé dele está só ao pé dele.
Alberto Caeiro
Beijinhos !
Dia 2 Nao estou o baldio (Ceci n’est pas une friche) - Carnet de voyage à Lisbonne des Martine’s