Couper dans la noirceur avec Barry Adamson
Toujours élégant et toujours cool, Barry Adamson est un homme qui semble néanmoins perpétuellement d'une autre époque. Dégageant l’ambiance d’un Rat Pack à lui seul avec un soupçon du légendaire Lee Hazelwood, sa musique n’a certainement pas grand-chose en commun avec les goûts traditionnels.
Le nouvel album de l’ancien bassiste de Magazine et des Bad Seeds est une collection élégante et charismatique qui s’inspire du gospel, de la soul classique, du blues et du jazz à travers une lentille cinématographique grand écran qui est peut-être mature, mais certainement pas carrée. Louche mais tranchant, Cut to Black est tour à tour atmosphérique et émouvant mais totalement spirituel et irrévérencieux. Qui d’autre, par exemple, aurait le culot de chanter « Je suis le Diable / Je suis ta mère », comme il le fait sur « Please Don’t Call on Me » ou d’appeler l’un de ses morceaux « Amen White Jesus » ?
Commençant par l'histoire de la disparition prématurée de la légende du R&B Sam Cooke du mauvais côté du fusil de chasse de la gérante du motel Elisa Boyer, « The Last Words of Sam Cooke » est une dose de soul exubérante des années 60 avec beaucoup de zeste rythmé, tandis que « Demon Lover » s’appuie sur les vibrations jazz-funk sordides pour un groove torride et hip-swing. « These Should be the Blues » a quelque chose de son ancien employeur, Nick Cave, avec de nombreux styles influencés par le gospel mais terreux et une chorale exigeant que l'auditeur « dépose son fardeau ». "Was It a Dream?", cependant, est imprégné de pop de chambre psychédélique atmosphérique avec une démarche traînante.
Cut to Black est exactement le genre d’album que l’on attend de Barry Adamson lorsqu’il ne compose pas de musique de film (remember Mullholland Drive… ) Il est peu probable qu’il finisse aux échelons supérieurs des charts, mais c’est un album qui fait part d’un sérieux constant et d’une vraie patte iconoclaste qui mérite toute votre attention. Ceux qui sachent, sachent ( les autres, apprenez! )
Jean-Pierre Simard, le 22/05/2024
Barry Adamson - Cut to black - PIAS