Gros plan apparent : la marche vers l’horizon de Cathy Cone
Dans des portraits empreints de surréalisme, les images multicouches de Cathy Cone jouent avec la nature transformatrice des photographies, nous invitant à voir le monde d'un œil nouveau.
Des yeux vous suivent derrière une fente dans un drap translucide. Une déchirure, vaguement cousue, traverse une image. Un nez émerge, et d'autres visages flottent au repos, adoucis et à demi cachés. Les superpositions, les coupes et les points de suture dans la surface enfumée créent un jeu de cache-cache. Peut-être avons-nous surpris quelqu'un en plein rêve, mais qui ? La personne sur le portrait ou l'artiste elle-même ?
Le travail photographique de Cathy Cone joue avec la conscience. Les images se déplacent, se tordent et se transforment dans son studio, leurs profondeurs étant révélées par les interventions matérielles de l'artiste. Dans sa récente série, Apparent Close-Up, elle combine portraits, images trouvées, peinture, vélin et fil. Les tirages qui en résultent dansent au bord d'un seuil, oscillant entre le connu et l'inconnu, entre la visibilité et l'obscurité. Le dédoublement abonde dans ces images, comme s'il faisait allusion au monde des rêves et à tout ce qui se cache sous la surface. Les portraits obligent le spectateur à s'interroger sur ce qu'il cherche et sur la forme d'intimité qu'il peut désirer dans l'acte de regarder.a vous de derrière une fente dans un drap translucide.
Utilisant le procédé de la photogravure, les images de Cone conservent une aura d'étrangeté. La qualité des tons est veloutée, voire sensuelle, ajoutant une forme physique aux compositions oniriques. La photogravure, un procédé par lequel une image photographique est gravée sur une plaque de cuivre, offre un large éventail de tons aux impressions qui en résultent. L'artiste a commencé à jouer avec ce procédé lors d'une résidence et a trouvé sa propre approche intime de la technique.
“J'ai commencé par faire des portraits avec mon appareil photo. Les plaques d'héliogravure sont recouvertes d'une feuille protectrice d'une couleur similaire à celle du vélin. Cette couverture est immédiatement devenue le matériau qui a guidé mon processus”, explique Cathy Cone. “J'ai commencé à découper le vélin et à photographier à travers. J'ai rephotographié certaines des gravures qui ont été collées avec des matériaux de base que j'ai trouvés chez un antiquaire local. J'ai également utilisé de la peinture à l'argile sur certaines des plaques imprimées avant de les exposer.”
Cone travaille dans une forme élargie de photographie, introduisant d'autres matériaux et montrant sa main dans les coupes et les plis qui créent un espace tridimensionnel débordant de mystère et d'énigme, ajoutant un élément de surréalisme à l'œuvre. Depuis ses premières expériences avec un appareil photo Diana, dont le penchant pour les fuites de lumière se prête à des expositions douces et pictorialistes, l'artiste a poursuivi une approche personnelle du surréalisme, expliquant : "Je me suis intéressée au mysticisme et aux idées alternatives dans de nombreuses modalités différentes". Elle cite les œuvres de Frida Kahlo, Louise Bourgeois, Leonora Carrington, Man Ray et Miro comme influences créatives.
Le titre de Cone provient de son étude à long terme du tai chi. Apparent Close-up, explique Cone, est un terme de tai chi où "l'idée est de marcher en se concentrant sur la ligne d'horizon avec l'idée que plus on s'en rapproche, plus elle s'éloigne". L'artiste a qualifié sa pratique en studio de réponse et de traduction. Attirée par des images qui la surprennent au premier coup d'œil, elle les ramène dans son atelier et tente de traduire ce sentiment, en y répondant directement, en construisant ce qu'elle sait pour découvrir ce qu'elle ne sait pas. Comme la marche vers l'horizon, l'œuvre elle-même est un mouvement, qui s'approche et qui suit, qui découvre et qui va toujours plus loin vers l'avenir.
Magali Duzant pour Lens Culture, édité par la rédaction le 5/7/2023
Les gros plans apparents de Cathy Cone