Chairway to Heaven : la danse sur le motif des sculptures de Debbie Lawson
Artiste écossaise multimédia, Debbie Lawson fait littéralement surgir des motifs des tapis ou de tout autre matériau employé pour forcer une sorte de passage entre deux mondes, comme un réensauvagement du motif qui surgit de la matière employée pour forcer le réel à en dire plus et autrement. Déroutant pour le moins.
Les sculptures animales de Debbie Lawson , plutôt que d'être camouflées par une forêt, une jungle ou un Arctique enneigé, émergent du tissu et dominent le spectateur, en créant une illusion tangible de diffraction entre plusieurs univers/ réalités à secouer la limite entre quotidien domestique et inconnu révélé.
Ses sculptures flirtent à la frontière entre imaginaire et réalité matérielle de manière inséparable. Les codes visuels s'entrechoquent, donnant forme à de nouveaux hybrides animés dotés d'une vie intérieure tranquillement sinistre et aspirant à être plus grands qu'eux-mêmes.
Son œuvre met l'accent sur les traditions culturelles entourant les objets quotidiens, en particulier ceux que l'on trouve dans les demeures de maître. Elle part d’une simple idée de travail sur le le tapis à motifs qu'elle utilise comme surface extérieure, en soulignant les qualités innées de la forme, tout en perturbant les codes de la vison qu’on s’en fait, de sorte qu'elle alterne entre trois et deux dimensions, créant un glissement visuel.
Son intérêt pour la vision du monumental à travers le prisme du domestique vient d'une préoccupation pour le picaresque (allô Don Quichotte!), une forme spécifique de narration où le protagoniste central, un personnage apparemment naïf et sans prétention, se lance dans une série d'aventures épisodiques, voyant à travers l'apparemment inoffensif pour exposer des significations cachées, et souvent plus sombres ou plus étranges.
La force de cette vision fait dire à Robert Clark du Guardian :
“L'air capiteux de l'encens des Mille et Une Nuits s'infiltre dans la pièce et nous séduit dans une rêverie ludique. Tout ce qui s'infiltre dans les domaines sécurisés de la maison familiale avec des soupçons d'esprit imprévisible et incontrôlable ne peut que nous transporter directement dans les rêveries de l'enfance".
Née à Dundee, Debbie Lawson vit et travaille à Londres. Diplômée du Royal College of Art et du Central Saint Martins, ses œuvres font partie de collectionsrenomées : The Saatchi Gallery, The House of Lords, Nottingham Castle Museum, Mario Testino, The University of the Arts London, The University of Dundee et bien d'autres au Royaume-Uni et dans le monde.
Ses expositions personnelles comprennent le Prix Fergusson : Magic Carpet à la Fergusson Gallery, Perth ; Our House aux McManus Galleries, Dundee, soutenue par le Scottish Arts Council ; Living Rooms à Nordisk Kunst Plattform, Norvège, soutenue par le British Council ; et Chairway To Heaven à l'Economist Plaza, Londres, commandée par la Contemporary Art Society.
Parmi les expositions récentes, citons la 250e exposition d'été de la Royal Academy of Arts, à Londres, où son œuvre a été sélectionnée par le commissaire/artiste Grayson Perry RA comme vedette de l'exposition (vidéo), The Ruskin Prize à la Millennium Gallery, Sheffield, et Eccentric Spaces à la galerie Riccardo Costantini, Turin. La sculpture qu'elle a commandée pour le Oor Wullie Bucket Trail a permis de récolter 20 000 £ aux enchères pour l'Archie Foundation's Tayside Children's Hospital Appeal.
Le travail de Debbie Lawson fait carrément un doigt d’honneur au discours dominant sur l’obligation vague d’obéir sans chercher à savoir ni comprendre. Son œuvre fait carrément exploser le très déconstruit discours dominant pour obtenir une totale soumission des citoyens en rendant à la vision sa pluralité de significations et son sens de l’inconnu proche, A la vision du contrôle, elle subtilise la sienne qui prend en compte et la frontière entre connu et inconnu et un passage possible - et manifeste - vers plusieurs dimensions à la fois suggérées et posées là pour en dire la pluralité. Son picaresque a un côté gothique qui vient brouiller les frontières et c’est très fort. Là où les puissants cherchent à limiter l’appréhension du monde en le réduisant à des entités connues, Wilson rend une autre pluralité collective, celle des rêves et de l’enfance de chacun. Ce que les précédents limitent par pauvreté de vision et discours inadéquats/réducteurs. En savoir plus sur Debbie Lawson ici et là
Jean-Pierre Simard
Chairway to Heaven : la danse sur le motif des sculptures de Debbie Lawson