Le Cabaret Contemporain où se joue la techno avec des instruments (est remarquable)
A froid, ça donne ça : Cabaret Contemporain est un groupe de musique indépendante français, association de cinq musiciens compositeurs et improvisateurs, d'un producteur et d'un ingénieur du son. A chaud, c’est carrément palpitant - sur scène, comme sur disque. Découvert par hasard, en première partie d’Acid Arab, leur set autour de Kraftwerk était superbe. Un album est sorti, on en cause, là tout de suite.
Le parti pris de Cabaret Contemporain est simplement de produire une techno instrumentale où les machines n’ont plus leur place. Les cinq musiciens, Fabrizio Rat au piano – transformé ou non –, Ronan Courty et Simon Drapier sur une paire de contrebasses, Julien Loutelier à la batterie et Giani Caserotto à la guitare, se sont rencontrés au Conservatoire de Paris à la fin des années 2000. Mais loin de tout académisme, la formation virtuose puise notamment son inspiration dans la techno des années 1990, de Drexciya à Robert Hood en passant par Jeff Mills, ce son infuse leur Séquence collective, troisième album en trois ans.
Et encore une fois, on tombe d’entrée sous le charme avec “Ballaro” et sa rythmique proche du dub, aux envolées atmosphériques et brumeuses. Ensuite, “Transistor” offre une course‐poursuite effrénée rappelant Jeff Mills, où les pistes s’accumulent en se superposant. Puis, “La Selva” installe un climat mystérieux qui débouche sur la trance downtempo de “La Chambre claire”. On note ensuite les deux titres écrits en collaboration avec Arnaud Rebotini (l’album sort sur son label), où on l’entend scander des “boogaloo” plaqués sur une mélodie répétitive et inquiétante. Plus loin, “Cactus” affiche ses airs de tech‐house sous stéroïde. Avec “TGV”, on retourne à la trance, que l’on se prend de plein fouet, à plus de 160 BPM au compteur. L’album se clôt après la seconde apparition d’Arnaud Rebotini. Séquence collective est un album remarquable dont les nuances entre downtempo et férocité servent la puissance, comme la puissance.
Tout cela confirme leur adage : « De la musique de club, mais faite à la main. » Séquence collective, disque intense, physique et abstrait, s’écoute d’une seule traite comme une séance d’un délire collectif très maîtrisé — une profondeur de son exceptionnelle, un groove décoiffant. Alors, soit on s’achète un casque, parce qu’à moins d’avoir un super système, on entendra pas tout, soit on court les voir sur scène au prochain passage. Sérieux, je recommande les deux…
Jean-Pierre Simard le 28/02/19
Cabaret Contemporain, Séquence collective, Blackstrobe Records