Yasmin Williams dévoile l'Acadie en six cordes stylées
Le jeu de guitare de Yasmin Williams est printanier et plein d'entrain, une pluie de notes apaisante ou des pousses vertes qui s'élancent vers le soleil. Au début de sa carrière, elle a développé un style idiosyncrasique qui mélange les techniques de tapping et le fait de jouer de l'instrument à plat sur ses genoux comme d'un dobro. C'est ainsi qu'elle a abordé son premier album en 2018, un disque de folk instrumental D.I.Y. qui s'est hissé de manière inattendue dans le classement Heatseekers du Billboard.
Elle a ensuite été repérée par le label indé de Caroline du Nord Spinster, qui a publié son deuxième album, plus raffiné, le remarquable Urban Driftwood, paru en 2021. La trajectoire ascendante de la musicienne de Virginie se poursuit avec Acadia, son troisième album et son premier pour le légendaire label Nonesuch. Il s'agit également de son album le plus diversifié à ce jour, qui présente un son plus stratifié incluant pour la première fois des voix, des guitares électriques et de nombreux invités.
Bien que les compositions inventives de Williams soient leur propre attrait, il est intéressant d'entendre ce qu'elle fera avec un label plus établi, une notoriété accrue et probablement un budget plus important. Dès le départ, Acadia est exploratoire et confiant, voire joyeux. L'ouverture "Cliffwalk" se compose d'un peu plus que de la guitare et des os - gracieuseté de son compagnon de route folk Dom Flemons - mais sonne exultant, une merveille technique jouée avec intensité pour les sièges arrière. "Hummingbird" est une autre belle balade de pics et de vallées, avec la violoniste Tatiana Hargreaves et la banjoïste Allison de Groot. Sur le céleste "Virga", le groupe de dream folk Darlingside de Boston ajoute des harmonies luxuriantes, tout comme la chanteuse et compositrice folk Aoife O'Donovan sur le doux "Dawning". Des percussionnistes sont disséminés un peu partout, tantôt à la batterie (Marcus Gilmore, Malick Koly), tantôt à pied (le danseur Nic Gareiss), tous acteurs sympathiques du petit monde unique de Williams.
Le set de neuf titres se termine par "Nectar" et "Malamu", deux chansons qui permettent à Williams d'aller au-delà de ses racines acoustiques. La première fusionne un motif de batterie trip-hop serré avec un post-rock mathématique, tandis que la seconde se transforme en une véritable session de jazz fusion avec des solos de saxophone et de guitare électrique en duel. Aussi douée techniquement qu'elle soit, Williams joue également avec passion, et Acadia est sans conteste son album le plus ambitieux à ce jour. Les fans de John Fahey et de Basho vont kiffer grave. Et d’ailleurs nous aussi; cela va sans dire.
Jean-Pierre Simard, le 7/10/2024
Yasmin Williams - Acadia - Nonesuch