Contre les bruits parasites, l'ambient de Shackleton, Zimpel et Siddartha Belmannu

In the Cell of Dreams est un album totalement immersif, qui oblige l’auditeur, à la fois à une attention soutenue et une sieste de l'ego. Basé sur le langage du drone, ses propriétés méditatives et curatives titillent l’évidence dès le départ. C'est une musique qui attire, appelle et accueille ceux qui sont à l'écoute de cette panacée et qui, ce faisant, bloque le bruit blanc et les conneries du monde extérieur. Un disque de rentrée quoi …

Interrogé par le Quietus il y a six ans, le musicien et producteur polonais Wacław Zimpel déclarait : "Je veux plonger dans la culture musicale indienne parce qu'elle est si fascinante. Je suis encore en train de l'étudier et je veux en savoir plus sur leurs systèmes rythmiques." Bien qu'il soit difficile de savoir s'il retravaillera un jour avec son projet indien, Saagara, - et on espère que ce sera le cas -, cette deuxième collaboration avec le producteur de musique électronique dark ambient Shackleton va dans le même sens, puisque le duo s'associe au chanteur de musique classique hindoustanie Siddartha Belmannu. En conséquence, le trio a façonné un album qui ressemble plus à un melting-pot de styles, de traditions et d'influences qu'à une collision d'idées. La dilution des lignes plus que le choc des cultures en est le moteur et le bonheur.

L'ouverture de 21 minutes "The Ocean Lies Between" est un exercice subtil de séduction auditive. Les premiers gongs et balayages modulaires cèdent la place à la voix tremblante de Siddartha Belmannu, mais il est loin d'être timide. À l'instar de ses collaborateurs musicaux, il sait capter l'attention de l'auditeur, tandis que les sons apaisants et les drones qui l'entourent tissent une magie hypnotique et séduisante.

Les étranges bourrasques de la clarinette alto de Zimpel et l'empilement instrumental qui s'élèvent doucement mais avec force sur " Everything Must Decay " ressemblent à une purge d'émotions et de pensées sombres où le trio vous fait travailler pour obtenir la paix qui va suivre. Il n'y a rien de facile ici, mais le voyage en vaut la peine. En prolongeant leurs explorations sans garder un œil sur l'horloge, Shackleton, Zimpel et Belmannu ouvrent un monde de possibilités qui invite à l'auto-analyse, à l'acceptation et à un sentiment de calme qui ressemble plus à un cessez-le-feu qu'à une reddition. Il s'agit d'un réétalonnage et d'une recharge.

Le morceau le plus court est 'Your Love Pours Like Water', mais même avec moins de quatre minutes, le trio nous offre un joyau concis qui utilise des boucles vocales et des vagues de synthé pour offrir une contemplation tout en préparant les longues excursions à venir. Plus important encore, In the Cell of Dreams est un glorieux échange d'idées provenant de sources disparates qui nécessite et offre le cadeau du temps, de la réflexion et de la guérison. Et c'est là une récompense rare et précieuse. Souverain, au casque, dans lle métro. On n’en dira pas plus et bonne rentrée.

Jean-Pierre Simard, le 18/09/2023
Shackleton & Zimpel with Siddhartha Belmannu – In the Cell of Dreams - 7K!