C’est les vacances avec un max de bonnes lectures magiques
Tout le monde veut vous parler de monstres et de bonbons, mais est-ce que par ce temps il ne serait pas plus judicieux de lire un bon livre ? Sélection presque d’Halloween, pour petits & grands, (parce qu’on parle de monstres et de magie, mais pas que…)
Pas mal de nouveautés destinées aux ados sont arrivées en cette rentrée chargée, de très bons titres en BD, comics ou manga qu’il serait dommage de laisser passer entre 2 blockbusters. Voici une sélection autour du thème de la magie, au sens large, pour faire plaisir à vos proches. Des livres qui peuvent être lus autant par les ados que les adultes (avec une précision pour chaque âge, pour que ce soit plus simple pour vous y retrouver). C’est récent et c’est excellent, alors place à la magie.
Et à la fin ils meurent, la sale vérité sur les contes de fées
De Lou Lubie, Delcourt
Dès 16 ans (sortie le 3 novembre 2021)
Dans cette sélection de nouveautés qui traitent de magie, de créatures fantastiques et de fables modernes, Lou Lubie vous propose un ouvrage parfait : une réflexion en bande dessinée sur les contes traditionnels. De leurs origines à leurs sens, cachés ou non, en passant par leurs auteurs.
De manière ludique, la dessinatrice confronte la vision Disney et leurs versions collectées par les frères Grimm, Charles Perrault, Christian Andersen ou Giambattista Basile. Elle compare différentes versions, en se basant sur les différents systèmes de collectes et de comparaisons récentes qui permettent de mettre en relation des contes issus de plusieurs cultures. Elle arrive à restituer ces écarts entre imaginaire populaire et réalités des contes originels, et à intégrer une bonne dose de documentation en gardant ce ton décalé.
Lou Lubie en décortique certains, en confronte d’autres avec leurs versions animées et cherche à comprendre si ces contes sont encore adaptés à notre époque en se demandant s’ils ne sont pas sexistes, racistes ou même trop violents. Avec beaucoup d’humour, l’autrice propose ses réflexions entrecoupées d’extraits choisis de contes qu’elle met en image pour alimenter notre propre réflexion.
On retrouve cette proposition de bande dessinée didactique, entre adresse au lecteur, journal de bord et vulgarisation qui avait fait le succès de sa première bande dessinée Goupil ou face. Un album qui se penchait sur la cyclothymie et la bipolarité fruit de son expérience personnelle et d’un travail de documentation.
Laissez-vous tenter par ce « petit » livre de 248 pages, lisible par les plus grands sur des histoires que l’on croit, à tort, réservées aux petits. Allez, on attend le prochain qui s’attaque aux chansons & comptines pour enfants, qui réservent les mêmes surprises, pour boucler la boucle.
Mermaid Saga T1 sur 2
De Rumiko Takahashi, Glénat
Dès 16 ans
Après les nouvelles traductions de Ranma ½ et Maison Ikkoku voici la réédition d’un titre méconnu de la dessinatrice culte Rumiko Takahashi. Attendue par les connaisseurs, cette courte série est l’une des plus réussies de la mangaka, Mermaid Saga offre un pendant plus sombre et plus mature à ses autres œuvres tout en gardant ses thèmes de prédilection. Message pour les parents qui lisent ces conseils, notez qu’il y a quelques scènes de nudité et de gore, mais rien qui justifierait de ne pas le faire lire à un ado averti. Place aux sirènes et à leur mortel secret : manger leur chair assure l’immortalité ou la mort.
Yuta, un jeune homme devenu immortel se met en quête de sirènes pour les comprendre et trouver un remède pour lui permettre de mourir. Après plusieurs siècles, l’éternel jeune homme est fatigué et cherche le repos, il aimerait vieillir et mourir comme un être humain pour partager la vie de ses semblables. Si son existence se recentre autour de cette quête, sa route va croiser les belles créatures espérées, mais surtout ses contemporains : certains avides d’obtenir ce pouvoir, d’autres effrayés par ces monstres. On découvre un Japon médiéval idéalisé et les figures de l’imaginaire collectif revisitées par Rumiko Takahashi. Elle pioche dans le folklore des yokaï pour créer son bestiaire de sirènes, entre monstres et divinités, et propose ses propres légendes associées.
À travers cette errance mélancolique, on découvre toute la poésie de Rumiko Takahashi. Habituée aux shōnens rythmés et pleins d’astuce, elle propose ici une narration différente qui s’approche plus du conte ou de la fable pour raconter les rencontres de Yuta et des sirènes. Chaque histoire pourrait se lire de manière indépendante après la première qui introduit le personnage et l’univers. L’écriture tranche assez avec ce qui se fait habituellement en manga et lorgne du côté de la production plus indé.
À travers ses dessins ou la narration, elle cherche à nous faire ressentir les émotions des personnages, des atmosphères et des questionnements plutôt qu’une intrigue au sens classique. Si cette écriture atypique fonctionne à merveille, c’est grâce aux dessins superbes qu’elle propose. Plus travaillés que dans ses autres séries, avec un découpage plus aéré qui permet de grandes cases ou pleines pages, la dessinatrice propose un manga très esthétique, que cette nouvelle édition grand format, en 2 volumes, met en valeur. Une œuvre indispensable pour ceux qui apprécient le travail de Rumiko Takahashi (pour aller plus loin, consulter le dossier ici) et une très bonne série courte pour se lancer dans le manga fantastique.
Wynd T1 L’Envol du prince
De James Tynion IV & Michael Dialynas, Urban Kids
Dès 15 ans
Nouvelle saga de fantasy appelée à devenir un incontournable, ce premier volume de Wynd est le point de départ d’une grande série réussie. Dans un monde où les créatures magiques sont traquées, où le Roi engage des limiers pour éradiquer le petit peuple, il existe des lieux préservés.
À Tubeville, le jeune Wynd doit cacher sa différence, il porte deux oreilles pointues qui marquent son lien avec la magie. Sans bien comprendre les enjeux, il suit les conseils de sa mère adoptive, car il a d’autres soucis en tête, le jeune homme cache un autre secret. Depuis quelque temps, il observe en cachette le beau jardinier du palais et reste troublé par la naissance de sentiments qui marquent sa puberté. Un habile parallèle, qui permet aux auteurs de parler d’acceptation de soi, d’homosexualité et de genre à travers ces créatures magiques qui doivent cacher leurs différences pour vivre en ville.
Cette quête d’identité va être troublée par l’arrivée de l’Écorché, un chasseur inquiétant qui décide de liquider les êtres doués de magie pour favoriser un coup d’État. Wynd doit fuir avec l’aide de son amie Oakley et se retrouve en cavale avec l’héritier du trône et son jardinier, tous traqués par le pouvoir et l’Écorché.
Avec sa forte pagination, et son écriture très rythmée, Wynd est une très bonne surprise, Michael Dialynas propose un découpage dynamique et immersif. Les planches sont pleines d’idées graphiques et de pleines pages assez jolies. Le dessin est un peu plus cartoon que les autres titres de cette sélection et cela colle très bien avec le projet de James Tynion IV, qui s’illustre une fois de plus dans le domaine du comics jeunesse après le remarqué Something Is Killing the Children.
Un premier tome engageant qui pose les bases de l’univers et de cette quête qui vont emporter nos héros bien loin de leur petite ville et de leurs préjugés.
Strange Academy T1 Première promo
De Skottie Young & Humberto Ramos, Panini comics
Dès 12 ans
Nouvelle approche tout public pour Marvel, qui tente un titre jeunesse (mais tout aussi pertinent pour les plus grands) autour de la nouvelle génération d’êtres magiques. La magie, dans le monde des super-héros, n’est pas particulièrement mise en avant dans des titres solos ; à l’exception des titres sur Dr Strange, il y a bien des magiciens de Loki à Wanda Maximoff (la Sorcière Rouge) en passant par Illyana Raspoutine (Magik), mais ils sont rarement présentés dans des histoires uniquement centrées sur la magie.
Dans Strange Academy Skottie Young & Humberto Ramos installent une école de magie, un peu façon X-men avec des sorciers en guise de mutants, pour mettre en avant la nouvelle génération de sorcières, démons, zombies… Avec en directeur d’école un Dr Strange, un peu plus cool que d’habitude, et des profs que vous reconnaîtrez facilement, ce titre est construit autour de la jeune sorcière Emily Bright qui découvre le monde magique de Marvel. En suivant ce guide, les lecteurs découvrent à la fois des personnages connus, leurs progénitures et de nouveaux héros. Et autre bonne piste pour ce 1er tome, à voir pour la suite, cette idée de mélanger les enfants de personnages habituellement cantonnés aux badguy.
Skottie Young est un auteur qui a imprimé sa marque dans les comics destinés à la jeunesse avec une lecture adulte ; et pour certains titres au contraire destinés aux adultes sous un vernis jeunesse (jetez un œil sur I Hate Fairyland avant de le confier à un jeune). Très dans l’air du temps, avec des petits bonus décalés, il garde ce ton léger et cette double lecture dans Strange Academy. Une approche qui colle bien avec le graphisme assez léché de Humberto Ramos. Son trait est très adapté à la féérie et la bizarrerie de ce projet et on a évidemment envie d’en voir plus.
Le Club des inadapté.e.s
De Cati Baur d’après Martin Page, Rue de Sèvres
Dès 9 ans
Imaginez la bande du Petit Nicolas devenue ado, qui continue de se réunir sur le terrain vague, de se questionner sur leurs enseignants préférés et directeur redouté, qui auraient toujours des incompréhensions avec leurs parents… mais à notre époque.
On découvre ici le Club des inadapté.e.s, autoproclamé composé d’une bande d’amis qui ont conscience de ne pas être dans la norme à l’heure d’entrer au collège. À cet âge où le conformisme est si important et où l’apprentissage se fait souvent dans la difficulté, car la peur de la différence est tenace.
Cati Baur adapte le roman de Martin Page dans une bande dessinée réussie qui arrive à parler simplement de thématiques difficiles : de harcèlement, d’agressions, de violences morales, de relations… Mais aussi le point de vue des enfants sur les parents, souvent peu abordés, pour dire la difficulté des parents face à ces problèmes ou même aux leurs qui brouillent l’écoute envers leurs ados.
Depuis leur « cabane refuge » nos héros vont se soutenir face à l’adversité et aux différents drames personnels jusqu’à ce qu’Erwan se fasse agresser et décide de créer une machine égalisatrice pour renverser le karma. Une machine magique, qui peut avoir des conséquences destructrices…
Avec un dessin toujours élégant, des idées de mise en scène réussie avec ces pleines pages régulières qui rappellent le côté graphique du roman jeunesse, Cati Baur propose une belle adaptation après son succès de Quatre sœurs d’après Malika Ferdjoukh.
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Thomas Mourier, le 29/10/2021
C’est les vacances avec un max de bonnes lectures magiques