Passé sous le radar - Le funk minimaliste des Meters coffré en intégralité
Remarqués par Allen Toussaint, le sorcier du son de NOLA, le claviériste et chanteur Art Neville (1937-2019), le guitariste Leo Nocentelli, le bassiste George Porter Jr et le batteur Joseph « Zigaboo » Modeliste démarrent en 1965 une carrière qui va faire d’eux les session men up to date pour très longtemps, à jouer un funk à nul autre pareil.
Quiconque souhaite comprendre le funk commence généralement par Sly Stone, James Brown ou George Clinton - dans son incarnation Parliament - mais il existe un troisième groupe tout aussi essentiel, dont le nom est loin d'être aussi familier : The Meters, qui ont développé un style de funk plus lent et plus libre qui doit beaucoup à leurs racines dans le sud des États-Unis. Tout d’abord, comme cela se faisait à l’époque, pour entrer dans le circuit , ils ont commencé, au mitan des 60’s, par des reprises de succès du moment. Avant de prendre leur envol sous le nom de The Meters – un nom tiré au sort, référence aux mesures sur une portée musicale – et de gagner le statut d’un des groupes fondateurs du funk.
Huit albums en studio, plus tard, commercialisés entre 1968 et 1977 par les compagnies phonographiques Josie, puis Reprise et sa maison mère Warner Bros., et plusieurs titres sortis à l’époque uniquement en 45-tours constituent leur héritage, tous rassemblés dans un coffret de 6 CD, Gettin’ Funkier All the Time (que l’on peut traduire par « devenir de plus en plus funky tout le temps », le mot d’ordre/moto du groupe). Le premier tube est là, ci dessous …
Et, pour définir leur son, ceci est assez commode : d'abord largement instrumental, le son des Meters est polyrythmique et repose sur une merveilleuse interaction entre les musiciens qui ne ressemble à aucun autre groupe soul instrumental de l'époque. Ses racines doivent beaucoup à l'héritage africain que l'on retrouve dans la musique de leur ville natale de la Nouvelle-Orléans. La différence la plus frappante est le jeu de tambour de Joseph Modeliste qui, comparé à la plupart des rythmes de l'époque, est souple et caoutchouteux. Il entraîne l'ensemble avec des guitares et des orgues qui se sabordent et tourbillonnent dans les sillons. Effet Garanti et son unique, difficile à copier ailleurs.
Le groupe s'est séparé après leur dernier album en 1977, et cela aurait dû leur être un coup d’arrêt final. Pourtant, leur musique a connu ensuite, une vie extraordinaire. Une génération de rappeurs a sorti leur funk des discothèques de leurs parents et ont rapidement réalisé que The Meters avaient les rythmes parfaits pour faire entrer le hip-hop dans le courant musical dominant. À ce jour, leur musique a été samplée plus de 500 fois sur des morceaux de Hip Hop et de R'n'B et il est juste de dire, qu’avec James Brown, leurs grooves ont été un des creusets de ce qui s’avère être aujourd'hui l'âge d'or du Hip Hop de la fin des années 80 et du début des années 90. Si cela ne vous suffit pas, sachez qu’ils ont joué avec tout ce que NOLA comptait de musiciens intéressants passés à portée et que Art Neville a été un membre des Neville Brothers, d’excellente mémoire.
Jean-Pierre Simard le 13/04/2020
The Meters : Gettin’ Funkier All The Time (The Complete Josie/Reprise & Warner Recordings 1968-1977) - Cherry Red