Bienvenue chez les dieux papillons avec Philipe Mayeux
Le covido-confinement aplatit les têtes et les esprits avec ses injonctions à rester trankilou partout. Mais, fi de la macronerie qui tousse, avec l’ouvroir de peinture potentiel de Philippe Mayeux qui expose ses dieux papillons chez Loevenbruck entre psyché et pop art réjouissant.
Parce qu’il sait que la vérité est ailleurs, il nous fait d’abord le coup du peintre-camelot, iconographe bon marché de monstres mi-hard-rock mi-train-fantôme (on en devine l’adolescence entre Gotlib et The Residents), qui fait peur pour rire. Mais cachée derrière les masques de fête foraine se révèle alors la vraie science (vs fiction), celle de la peinture. Philippe Mayaux est un alchimiste. Le monstre qu’il affronte depuis toujours, et singulièrement dans ses derniers tableaux, c’est le monstre de la peinture. En ce sens, loin du registre pop, auquel il est parfois associé, c’est en tant que peintre fondamental qu’il expose cet automne à la galerie Loevenbruck. Les peintures récentes de Philippe Mayaux sont plus réflexives que jamais. Intitulées Butterfly Divinities, elles composent un ensemble de petits tableaux où sur fond intergalactique se déploie un gang bang de têtes gargouillesques, pratiquement all-over. La méthode qui produit ces figures est simple ; comme tout dans l’Univers, tout part d’une tache, qui se dédouble, puis se démultiplie.
Ici, pas de psychologie à la Rorschach, les bouches grimaçantes s’extraient de la matière première, telles les ombres de la Caverne. Et en un battement d’ailes, le papillon se fait dieu et appelle Philippe Mayaux à surpasser d’une dimension encore — au moins — l’étoilement de sa peinture.
Philippe Mayaux voit surgir à la surface le monde intérieur du tableau, et sa peinture en fixe l’empreinte. Au-delà des illusions ludiques des paréidolies, des exercices de divination dans le marc de café, les tableaux de la série Butterfly Divinities ne nous disent rien de l’avenir ou de nous-même, et c’est pourquoi ils sont à la fois beaux et angoissants, absolument contemporains. Fixés ainsi pour l’éternité, ce sont les portraits des tableaux eux-mêmes qui nous regardent en miroir et nous percent de leurs pupilles aveugles.
Nicolas Chardon le 24/12/2020
Philippe Mayeux - Butterfly Divinities → 16 /01/2021
Galerie Loevenbruck 6, rue Jacques Callot 75006 Paris