Passé sous le radar : "C’est comme ça" de Jirô Ishikawa
Ici, on vous fait entrer de plain-pied dans un appartement fait de papier avec des pretty love – tumeurs trendy – par dizaines sur les visages des gens, des ébats crus tendance décor baroque ou encore Ckinkoman, l’homme-bite affublé d’une tête de gland… Autant d’éléments d’une société grotesque dominée par la pulsion sexuelle. Et cernée par le phallus-roi… C'est peu de dire que le voyage dérange.
Les éditions Matière publient des albums aussi barrés qu'irréprochables, : Prokon, La Salle de la Mappemonde, Le Programme Immersion, Tarzan contre la vie chère. Avec C’est comme ça, on vous sert un recueil d’histoires courtes signées du mangaka Jirô Ishikawa. Le lecteur y part en quête d’un univers loufoque et bariolé, peuplé d’homme-glands et de corps masqués, le tout à l’ombre de gratte-ciel fiers comme la Tour Eiffel, sortes de phallus orgueilleux aux lignes froidement géométriques. Et ce n'est que le début…
Moins le délire d’un esprit tordu que l’image vertigineuse d’un monde fantasmé, rêvé ou fantasmé malsain, C’est comme ça aligne, façon Bazooka, les tableaux bizarres pour mieux saisir l’étrangeté du monde, aussi fascinant qu’inquiétant.
Avec un trait d’une redoutable élégance – l’éditeur évoque son « psychédélisme organique » –, le mangaka électrise ses découpages, mime des semblants d’action et met en scène des personnages sortis de nulle part, ajoutant à l’effet comique par ses décalages. Délirant, fécond, l’album ne cesse d’interroger autant par sa délicatesse que ses mystères. Une belle découverte !
Jean-Pierre Simard le 4/09/17 (avec Bodoï)
C’est comme ça de Jirö Ishikawa
éditions Matière