Remonter à la source des Notes Bleues avec Tony Allen
Batteur emblématique de l’afrobeat qu’il a inventé avec Fela Kuti en une dizaine d’années (de 68 à 79), Tony Allen enregistre son premier album pour Blue Note, et nous murmure un jazz totalement libéré des clichés, après avoir traîné ces dernières années ses fûts dans toutes les galaxies musicales, de la chanson française électro à Damon Albarn et au hip hop…
D’abord les gimmicks, cette petite phrase qui va se présenter, puis se répéter, se décliner jusqu’à devenir, bien plus qu’un refrain. Une sorte de mantra qui habitera le morceau, le fera rebondir, le fera respirer, le fera vibrer. Le fera exister. Ce qui est remarquable dans The Source, album entièrement instrumental, c’est que l’afrobeat si indissociable du batteur, de par son histoire et son jeu, n’est pas que le fruit du maniement des baguettes.
Les compositions signées Allen dessinent un nouveau paradigme de la musique (afro-américaine) d’origine nigérienne issue du Lagos. Elles effacent les contours des frontières entre free jazz, afrobeat et jazz plus « classique » comme dans Bad Roads aux accents coltraniens, en reconnaissant une lignée qui va d'Ellington aux arrangements d'Oliver Nelson .
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Comme un fin voile devant la fenêtre de la chambre en plein été, filtrant la lumière de l’astre sans les brûlures, les riches patterns éclairent les thèmes sans jamais les griller. Au contraire, ils s’enflamment (On Fire) et diffusent une chaleur, nourris par les coups saccadés, offrant juste assez d’oxygène pour réchauffer les plages du disque (même dématérialisé). Cruising témoigne de cette quasi douceur, terminant dans un « beat » qui sans s’éteindre, suspend gracieusement l’instant où le silence révélera toute la beauté du titre.
Depuis qu’il a quitté Fela Kuti, Tony Allen n’a cessé d’expérimenter. Jamais avare de collaborations parfois incongrues mais toujours sincères (écouter LA RITOURNELLE de Sébastien Tellier est à lui seul le morceau qui justifie de découvrir le sens du mot : collaboration). Damon Albarn vient même jouer du piano électrique sur le très Big Band Cool Cats. Il savoure cette liberté totale qu’un homme de 77 ans est en droit de s’octroyer et sait la partager. Si la guitare marque d’une grande justesse l’empreinte de l’afrobeat par ces quelques notes répétitives si caractéristiques, c’est l’agencement de l’ensemble qui rend l’écoute excitante et vivante.
Richard Maniere le 13/09/17
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Pour un premier album chez Blue Note, Tony Allen ne se laisse pas impressionner, il en a vu d’autre ! Les pièces s’enchainent comme autant d’histoires d’un livre de contes qui nous émerveille, nous angoisse un peu (Wolf eats Wolf), mais ne nous laisse jamais sur le bord de la route. Jusqu’à ce qu’on affirme à l’unisson que la « Life is Beautiful », en tout les cas assez « beautiful » pour se remettre le disque au début et se raconter d’autres histoires. Revenir nous désaltérer, nous aussi, à la source du Jazz.
The Source de Tony Allen, Blue Note