L'envoûtant "Migration" de Bonobo
Simon Green, alias Bonobo, est de retour avec son sixième album Migration, une superbe réussite électronique: luxuriant, frénétique, magnifique, mélancolique, joyeux, débordant autant d’émotion que de maîtrise technique, Migration est peut-être sa tentative la plus ambitieuse d'exprimer les composantes de l’existence. En tout cas, il y consacre un album de haute volée.
“Depuis toujours, l’objectif est de ne pas me répéter, dit-il. A chacun de mes nouveaux albums, je cherche à me mettre en danger, à aller vers quelque chose que je ne connais pas et à faire en sorte d’être constamment à l’écoute de nouvelles musiques.”
L'album regroupe quelques prestigieux invités, parmi lesquels Michael Milosh de Rhye, Nick Murphy (Chet Faker), Nicole Miglis de Hundred Waters, ou les marocains d'Innov Gnawa.
Alternant titres d’ambient pur et morceaux plus dynamiques, non sans rappeler son North Borders, abordant par moments un poil de pop ou de musique du monde, Bonobo semble être à l’apogée de ce qu’il peut offrir. On retiendra notamment le titre avec le groupe marocain Innov Gnawa, Brambro Koyo Ganda, dont on ne s’en lasse vraiment pas.
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Migration, premier titre amorce l'envoi, promettant de nous faire voyager à dos de caresses musicales aux rythmes doux et néanmoins énergiques. A l’image d’autres morceaux tel que Second Sun, Grains, ou Figures, Break Apart nous installe dans une ambiance mélancolique, accentuée par la très sensuelle voix de Ryhe.
Outlier offre huit minutes de voyage sonore, alternant une somptueuse mélodie et des rythmes plus électroniques. Surface, en featuring avec Nicole Miglis, s’élève assez haut par la voix de la susdite. Bambro Koyo suggère de grandes envies d’ailleurs, tout comme 7th Sevens dans les dernières pistes. Quant à Kerala, au clipdévoilé il y a quelques mois avec Gemma Arterton en guest, il est tout bonnement l'archétype de la construction de l’album. La visite de Nick Murphy (Chet Faker), sur No Reason est des plus envoûtants et sent le tube à plein nez. Ontario clôt le voyage avec un rythme quasi hip-hop, pour un dépaysement assuré.
“Migration n’a rien de revendicatif et ne fait pas référence aux politiques actuelles, précise Simon Green. Je ne vois d’ailleurs pas comment je pourrais prôner un message avec une musique essentiellement instrumentale. Cela dit, indirectement, il reflète l’état du monde, le fait que l’on puisse avoir une influence sur la nature, et inversement. C’est un disque à entendre comme une collection de cultures.”
A l’image également de ces douze morceaux luxuriants mais fragiles, à la matière mouvante, qui incitent à regarder différemment les paysages qui nous entourent. A en contempler les mille recoins et à plonger dans un état de complète félicité. Au finish, un album surprenant, calculé pour vous faire ressentir tout une palette d'émotions (la palette, nous voici !). Migration est un mode/monde musical décalé ; quelque chose qu'il faut avoir écouté et vécu. Presque aussi bien que notre album favori, le Black Sands de 2010 chez le même label.
Maxime Duchamps
Bonobo - Migration - Ninja Tune