Notre bande son pour l'exposition "Provoke" au BAL
Le Japon des années 60 a été un chaudron politique et social qui a rué des fers sous la toute puissance américaine. Cela s’est traduit dans les arts majeurs : du cinéma au graphisme, en passant par la musique et le théâtre. En écho à l’exposition du BAL retraçant l’histoire de la revue Provoke, nous avons concocté un mix qui offre un tour d’horizon rapide des dégagements musicaux particuliers auxquels l’époque a donné lieu.
Pendant que la Californie découvrait les Beach Boys, Surfaris et autres Ventures, Tokyo vouait un culte à ces derniers qui ont durablement marqué la scène locale en faisant des tournées quasi annuelles là-bas avec un succès renouvelé. Le surf étant une porte d’entrée commune aux groupe rock garage avec ses effets de manche et de pédale à plusieurs guitares, cela a permis de nombreux groupes de s’imposer en copiant ce son, le faisant évoluer au passage (voir les Dynamites, Savage et autre Golden Cup).
Partant de la culture beatnik et du folk contestataire de Dylan, des musiciens issus de la scène de Kyoto et du mouvement des occupations des facultés en lutte, on trouvera ainsi aussi bien les émules du Velvet Underground les Rallizes Dénudées que l’immense Zunou Keisatsu (Brain Police), dont le premier album sera interdit pour avoir osé mettre en photo de pochette, un cliché du Mesrine local. D’autres manifestations moins copycat avec le Flower Travelling Band, en mode Grateful Dead, mais voyageant aux quatre coins du monde et participant aux festivals en Europe. On ne passera pas non plus sur l’influence majeure des groupes de biker orientés hard à la Blue Cheer qui poussent le psychédélisme vers d’autres rythmes comme le power trio de Blues Creation, ou le groupe au nom aussi poétique que provocateur, au su de l’aversion de la culture japonaise pour l’usage des drogues avec Speed, Glue & Shinki, la dernière étant une drogue locale, aussi capable de ballades enfumées comme « Don’t Say No » que d’hymnes à la fellation, comme « Chuppy », sur fond de clavecin baroque, voire de rebondir sur le premier sujet avec « Sniffin & Snortin’’. La classe !
Par ailleurs, avant de loucher vers le krautrock ( planant allemand des 70’s) le pays du Soleil levant tente des hybrides folk en mixant bouddhisme et rock ou jazz à bambou avec People et Minoru Muraoka ou partent à la recherche d’un son aussi tribal que psychédélique avec Akira Ishikawa & Count Buffalos. On note une tentative soul avec Love Live Life + One et des iconoclastes qui font autant de musique de films que d’albums perso, comme J.A. Caesar dans un élan classique, avant de terminer par un seul exemple de la scène free jazz. Il aurait fallu parler de Keiji Haino, mais nous avons sélectionné Toshiyuki Miyama and his new herd Masahiko Sato.
Pour aller plus loin, vous ouvrirez YouTube qui ne possède pas de moteur de recherche, le Japrocksampler de Julian Cope (éditions Le Mot & le Reste) à la main, et y découvrirez des sons vraiment hallucinants…
Jean-Pierre Simard pour le BAL