Dream baby dream, le Suicide trip
"Pour commencer, il a fallu tailler dans ce nœud coulant, s’arracher de cette vie qu’on nous forçait à vivre, vaincre cette vie qui voulait vivre à notre place, on s’est battu avec acharnement contre tout ce qui nous entourait, l’ennemi en surnombre, partout, et même contre l’ennemi intérieur. Avec quoi ? Avec du son."
Lydia Lunch
L’idée de ce livre remonte à cinq ans en arrière. J’étais alors en train d’essayer de lancer une série de livres-CD intitulée Watch the Closing Door: A History Of New York Musical Melting-Pot. Mon plan était de raconter, décennie après décennie, l’histoire de New York à travers la musique. Je voulais brosser le portait de cette ville avant qu’elle ne soit plus qu’un terrain de jeux pour les riches. C’était aussi une déclaration d’amour à une ville qui me fascinait depuis mon plus jeune âge et où j’avais vécu dans les années quatre-vingt. Maintenant que j’avais repris de la distance avec cette cité, je pouvais travailler sur son histoire. C’était pour moi une façon d’y retrouver mon compte.
Je travaillais aussi sur un autre projet de livre-CD, Dirty Water: the Birth Of Punk Attitude, qui recensait les premières manifestations de l’esprit punk. Je le répète, le mot punk n’a pas fait son apparition dans un bar de clochards du Bowery. Il remonte à l’époque du blues et du bebop. Suicide aurait occupé une place de choix dans cette série, ainsi que dans la série sur New York si j’avais pu atteindre les années soixante- dix.
Alan et Marty ont incarné tout ce qui était unique, dangereux et déterminant dans cette ville, au siècle précédent. Ils ont relevé les défis culturels les plus importants et ont su cristalliser l’état d’esprit d’un pays ravagé par la guerre du Vietnam. Ils sont ensemble depuis 45 ans. Ils ont démarré avec un spectacle agressif et anticonformiste et ils finissent par être reconnus et occuper finalement leur vraie place dans l’histoire du rock.
Où sont passés les soi-disant groupes à succès, maintenant ? Pour eux, ça a marché quelques années puis ils ont disparu définitivement. Nous, on voyait plus loin. Et on est encore là. Alan Vega
D’un Marty obsédé de doo-woop et du jazz de Monk, Miles et Trane qui a bossé pour arriver à les jouer, à Alan obsédé par le rockabilly des origines, le Velvet, Iggy, Question Mark & the Mysterians et les Silver Apples, Kris Needs déroule le fil leurs existences qui sont beaucoup plus riches et tumultueuses que le monde du rock ne les raconte ordinairement.
Collant aux diverses scènes musicales et artistiques d’avant-garde de la Grosse Pomme, leur duo, après 45 ans d’existence et quelques révolutions soniques s’est arrêté par défaillance d’Alan Vega. Quelle idée de partir en juillet en nous laissant orphelin d’un autre son en gestation, hein ? Super musique, sacrées histoires - un livre vraiment bien fouillé et raconté avec feeling.
Suicide, dream baby dream de Kris Needs, éditions Camion Blanc